'Les femmes ont à leur disposition deux armes terribles : le fard et les larmes. Heureusement pour les hommes, elles ne peuvent pas s’en servir en même temps.'
- Marilyn Monroe

On était au Jardin Anglais. Il faisait tellement froid qu’il n’y avait aucun dealer. Je n’avais pas encore de veste d’hiver. Seulement mon blouson de jock américain. Un bonnet et des énormes moufles en fausse fourrure. Une petite robe noire et mes cuissardes. Elle, elle portait sa veste de ski bleue, absolument dégueulasse. Un jeans. Des bottes brunes. Je m’en souviens car on a pris une photo ensemble. Je l’ai toujours dans ma table de nuit, planquée sous des livres et un tube de lubrifiant. Nos visages sont tout rouges. On est collées l’une contre l’autre. Le jet d’eau, supposé jaillir à l’arrière-plan, est éteint. J’ignore pourquoi on est sorties ce jour-là. Tout le monde était resté chez soi. Trop de neige. Pas de transports publics. Bordel sur les routes. Glace sur les chemins. On s’est fait chier. J’avais arrêté la weed en ce temps-là. Elle était prête à fumer devant moi. Ça m’a énervée. On s’est engueulées. On a plus parlé. On était posées sur un banc, le cul mouillé. Et personne ne parlait. C’était la dernière fois qu’on se voyait.

Maeva, Maria, Aude, Matt et des autres que je ne connaissais pas. On s’est posés sur une petite colline entourée d’arbres. Pas de risque pour les flics. Dans l’herbe. Il faisait vraiment chaud. Et il y avait un putain de soleil. J’ai pu enlever ma veste en cuir dans laquelle j’étouffais. On n’avait pas nos deux période de design ce matin. Trois heures à tuer, cinq joints fumés. Matt avait un énorme lovebite. Aude est jalouse de sa nouvelle copine. Son ego est tellement surdimensionné qu’elle veut tous les mecs à ses pieds, et s’énerve quand ça n’est pas le cas. Comme pour Vince, qui m’aime bien moi et pas elle. Elle m’a fait la gueule pendant deux jours, cette conne. On a mis du reggae. J’aurais préféré du dubstep. Ou du ragga. Le reggae, c’est cliché. On a ensuite enchaîné avec une heure de marketing. Puis fin des cours à 13h30. Fumé un joint dans la cour avec Maeva. Maeva ne m’apprécie seulement quand Maria n’est pas avec nous. C’est frustrant. Demain, 8 heures, rattrapage de test de maths. Puis de marketing. I’m screwed. Je ne sors pas. Je ne verrai pas Natalie. Je ne verrai pas Michael.

J’ai écrit une lettre à Mom. Pour lui dire que j’ai recommencé la weed. Car 'écrire est une façon de parler sans être interrompu.' J’ai pleuré tout le long. Je ne lui ai pas donné. J’ignore si je vais la lui donner. Je vais peut-être la poser, bien en évidence, sur mon bureau qu’elle fouille régulièrement.