Jewel

Bubble.

Chacun de mes actes est une destruction.

La vie est moche. La weed, c’est moche. Et magnifique en même temps. Quatre ans de ma vie perdus à me droguer. J’ai perdu trop de gens. Tout le monde oublie tout le monde. Tout le monde se quitte. Tout le monde divorce. Sauf mes parents. Alors que Mom souffre depuis des années. C’est pas juste. Je vois Mom vieillir. Caro grossir. Aaron s’éloigner de nous petit à petit. Moi aussi, je veux partir. Je ne supporte plus. Dad. Les cours. Les gueules de merde des profs. Ces filles avec qui je traîne. Elles me laissent de côté. Cette impression d’être à un fashion show en arrivant à l’école. Quand je marche, seule, au milieu de tous. Les regards me suivent. Et ces Beiges qui m’analysent de la tête aux pieds. Tout le monde oublie tout le monde. Tout le monde passe à autre chose. Le froid. Toute cette bouffe dont je dois me gaver pour prendre quelques malheureux grammes. Caro qui se fait marcher sur les pieds. Chuck qui ne trouve pas de copine. La thune que j’ai volée. Et toute cette thune que je demande à Dad. La culpabilité que je ne ressens pas. Cette routine me casse les couilles. Être une femme me casse les ovaires. La thune que j’ai dépensée dans toutes ces différentes drogues. Des milliers de francs. Genève, ville la plus dangereuse de Suisse. Les agressions. Sur moi, sur Aaron. Ma solitude. Ma réelle solitude. Natalie et sa fausse joie de vivre. Natalie et sa gueule qu’elle ouvre un peu trop souvent. Ma maigreur. Ma faiblesse. Ma tendance à me la jouer sûre de moi. La Suisse, que je rêve de quitter. San Francisco, que je rêve de retrouver. Mes rats que j’ai laissé crever. Cette empathie que je n’ai pas. Ce froid qui m’habite. Cette envie d’abandonner tout le monde. Et Lucas, bordel de merde. Cette crainte de l’apercevoir derrière la fenêtre en train de m’observer. Ce sentiment d’être épiée en permanence. Cette paranoïa amplifiée par la weed. Dévisagée. Jugée. La rue me fait peur. Nastasya qui ne m’a jamais rappelée. Que je n’ai jamais rappelée non plus. Cette poussière qui m’empêche de respirer. Le bébé que je n’ai pas assumé. Ces bières en train de moisir. La laideur des gens. Leur intelligence primaire et leur homophobie. Leur intérêt envers le iPhone, Facebook et 'My Super Sweet 16'. Mon chien écrasé. Maeva qui a avorté à son tour aujourd’hui. Mes poumons noircis et encrassés. Je fume même quand j’ai mal à la gorge. Je suis stupide. Dans mon monde. Effrayée par les gens que je ne connais pas. Et attirée par l’inconnu en même temps. La richesse de la Suisse, dépensée inutilement. Cette région riche de Genève dans laquelle j’habite. Remplie de 4x4. De mères de famille aux cheveux peroxydés. Cette bulle dans laquelle je vis. Surprotégée. Gâtée. Ma haine envers les enfants. Mon racisme naissant envers le pays d’où venaient mes agresseurs et ceux d’Aaron. Je suis contradictoire. J’ignore ce que je veux. Je sais plus ce que je dis, je sais plus ce que je pense. J’ai perdu ma facilité à aller vers les gens. Je me fait rejeter. Je ne fais rien. Le monde entier a des soucis. Y a qu’à voir sur ce site. J’aimerais pouvoir trouver un seul journal dont l’auteur est comblé de bonheur. Qui ne se plaint pas. Qui ne se casse pas la tête à propos d’une personne du sexe opposé. Du bonheur, il n’y en a pas. Mom qui commence à parler toute seule. Mon corps de petite fille. Mon statut de 'fille populaire' que j’ai abandonné du jour au lendemain. Mon voisin est mort. L’ex de Caro est mort. Nastasya est morte. Sous un train.