Jewel

Dyke.

'You’re a slowmotion suicide.'

Beaucoup de choses se sont passées. Beaucoup de gens ont été trompés. Beaucoup d’alcool a été bu. Beaucoup de weed a été fumée. Les clopes, je n’en parle même pas. J’ai été infidèle. J’ai été déloyable. J’ai été faible. J’ai embrassé un autre gars. Un gars magnifique. Pour ne pas culpabiliser, je me dis qu’embrasser n’est pas tromper. Who am i kidding ? Je l’ai trompé. J’ai trompé Francisco. J’aurais baisé avec ce mec si Mom n’avait pas été dans la pièce à côté, en train de vomir. Elle vomit presque chaque nuit. Il m’a doigtée. Puis je l’ai envoyé chier. J’ai fumé. J’ai fumé de la beuh. En groupe. A deux. Toute seule. Toute seule. Deux fois. La deuxième fois, c’était il y a quinze minutes. Je suis défoncée. Défoncée. J’ai un nuage à la place du cerveau. Je reste bloquée sur des choses insensées. Des choses qui n’existent pas. Des choses que ma tête, affolée par la drogue, invente. Putain de merde j’ai fumé. Je ne vais pas replonger, mais c’est un échec. Une clope. Il me faut une clope. Il me faut de l’eau. Il me faut mon copain. Mon copain qui est à plus de deux mille kilomètres de moi. Mon copain absent pendant un mois. Sans lui, je suis seule. Littéralement. Natalie est en France. Aude baise avec son blond. Maeva, elle a disparu de ma vie. Je ne sors plus. Me lever le matin, ou plutôt l’après-midi, me demande une force surhumaine. Je suis épuisée mais je ne dors pas la nuit. Je ne veux pas dormir. Une bière. Je vais me prendre une bière. Je ne dors presque plus. La nuit, je fume des clopes en regardant The L Word et me demande en les voyant si je ne suis pas lesbienne. La nuit, j’envoie des sms à Francisco, auxquels il ne répond pas parce qu’il n’a plus de crédit. La nuit, j’écoute de la musique. Je suis sur Placebo en ce moment. Les premiers albums. Quand ils étaient encore queer. La nuit, j’écris une histoire. L’histoire d’une fille frigide et amoureuse de son frère. Une histoire assez trash mais pas vulgaire. Quand j’étais petite, je rêvais d’être écrivain. J’ai écrit une vingtaine d’histoires. Mais je n’ose pas les faire lire. L’amour et la drogue sont mes thèmes préférés. Deux thèmes qui me fascinent. Deux thèmes qui me concernent. La nuit, je regarde les étoiles à travers mon velux au dessus-de mon lit. La nuit, je pense à des trucs cons. J’imagine d’autres populations, sur d’autres planètes, dans d’autres systèmes solaires. J’imagine ce que ça ferait d’être un homme. J’imagine comment aurait été ma vie si certains petits détails avaient été différents. L’effet papillon. Ça me fascine. La nuit, je prends soin de moi. Je me mets de la crème. Je me fais des masques. Je m’épile. Je me fais les ongles. J’essaie de me convaincre que je suis belle. La nuit est devenue la journée. La journée est devenue la nuit. A la lumière du jour, je somnambule, éblouie. Je suis défoncée. Je sens la bière descendre dans ma gorge puis dans mon estomac. Une chaleur dans mon oesophage. Un engourdissement dans mes doigts. Un battement dans mes yeux. Je suis seule. J’ai toujours été seule. Je sais que ce n’est pas vrai, mais c’est mon ressenti. Je suis toujours entourée de gens. Je vis dans une famille de six personnes. J’ai des amis. J’ai des potes. J’ai un copain. J’ai toujours du monde à mes côtés. Mais personne à qui parler. Personne à part vous. J’ouvre un nouveau paquet de cigarettes. Je bois une gorgée de ma bière. Je change de chanson. Je cherche les éventuelles raisons de mon mal-être constant. De ma noirceur. De mon amertume. De mon envie d’autodestruction. De mon besoin d’autodestruction. Je n’ai jamais trouvé. Aucun psy n’a jamais trouvé. Placebo - Julien. Mom qui va à des réunions d’alcooliques anonymes. Dad qui prétend qu’il est un homme bien. Chuck qui ne trouve pas de copine. Aaron qui se barre de la maison. Caro qui se fait battre par son copain. Jewel qui ne sait pas quel est son fucking problème. J’écrase ma cigarette.