Jewel

Stalker.

Vivre tue.

Je me sens seule. Mes amies, Amanda, Jessie, Carina, ne sont pas là pour moi. Maeva, Aude et Maria sont dans leurs trips. Moi, je suis à côté, sans aucune envie de sortir un truc marrant ou de participer à leurs conversations. Je ne pense qu’à Nastasya. Elles ne sont pas au courant. Mom est en boîte. Mes frères et soeur sont sortis. Dad dort. Anyway qu’est-ce que ça change qu’il dorme ou pas ? On se parle pas. J’ai pas de copain. Je m’en fous, j’aime ça, mais c’est dans ces moments de solitude que j’aurais besoin de quelqu’un. Je ne suis pas sortie ces vacances. J’ai rien fait. Deux semaines. J’ai été malade pendant dix jours. J’ai paranoïé à propos de Lucas. C’est toujours le cas. J’ignore pourquoi. Peut-être qu’il a enfin compris, après un an d’harcèlement, que je ne voudrai plus de lui. Qu’il doit arrêter d’être un putain de stalker. Je perds mon temps. J’ai regardé deux saisons de The Jersey Shore (j’assume) en quatre jours. J’ai pas bossé. J’ai pas répondu aux messages de Natalie, alors que j’avais, au fond de moi, sans vouloir l’admettre, besoin d’elle. Elle est partie pour deux semaines. Je me sens seule. Je me sens moche. Je me sens sale. J’ai l’impression de doucement basculer à nouveau dans une période d’autodestruction. Il faut que je sorte. Que je parle. Que je boive. C’est mauvais pour moi de ne pas voir des gens. Car mon envie d’isolation augmente à mesure que je reste seule. Cycle infernal. Si je me défonçais encore, je serais dans un sale état à l’heure qu’il est. Je n’irais même plus en cours. Je fumerais. Dormirais. Fumerais. Dormirais. Tout ça c’est fini.
J’ai pas assez mangé. Je ne grossis pas, je maigris vite. J’ai décidé de grossir. Pour de vrai. Diététicienne, compléments alimentaires et tout le bordel. J’ai pris un kilos en une semaine. J’atteindrai peut-être les 55 kilos. Avec un peu de chance. J’en fais 48. Avant j’étais mince. Maintenant je suis maigre. Maigre c’est pas beau. On voit mes os. J’avais des seins. Des hanches. J’ai des bleus tout le long de ma colonne vertébrale à cause de mes os qui ressortent. C’est dur de bouffer autant. J’avale 3500 calories par jour. Je suis frustrée de voir que mon poids augmente si lentement. J’ai envie de pleurer quand j’ai quelques grammes de moins que la veille. Quand il n’y a plus de lait entier dans le frigo. Seulement du lait écrémé. Quand les filles veulent manger une salade à midi. Je ne peux pas leur dire que j’ai besoin d’un repas à 1000 calories. Je suis tellement mal à l’aise. Elles me détesteraient, elles qui enchaînent les régimes. Je me sens seule. Seule dans ma situation. A me battre pour prendre un peu de poids. A devoir manger. Encore. Encore. Encore. Sans devoir m’arrêter. Sans avoir le droit de me dire que je n’ai plus faim. Encore. J’ai envie d’eau. Des litres d’eau. Je bois du lait entier à la place. Encore. Encore. Encore. Manger en fonction de la teneur en calories. 'C’est du lait entier dans le latte macchiato?' Je me sens conne. Les calories commencent à m’obséder. 'Big Mac 495.' Je ne vois plus l’aliment, je vois ses calories. Les titres des magazines m’énervent. Maigrir. Maigrir. Maigrir. Et moi, alors ? Je ne peux pas m’empêcher de gueuler sur Jessie quand elle dit qu’elle est grosse. Elle est très mince. Elle est très jolie. Elle n’a pas besoin de régime. De même pour la plupart des femmes. Je veux un corps comme elle. Mince. Musclé. Plus de seins et de hanches. Pour l’instant je prends du ventre. Et du cul. La seule partie de mon corps où j’ai assez de graisse, où je n’ai pas besoin de grossir. Mon corps se fout de moi. Natalie se fout de moi. Je me sens seule. Tellement seule. Je garde trop de choses pour moi. Je n’ai dit à personne que Lucas a fait un compte Facebook à mon nom. Son amie Laurence dit que ce n’est pas lui. Mytho. Il a ajouté James. Le mec avec qui je l’ai trompé. C’est James qui m’a mise au courant. Moi j’ai pas cette merde de Facebook. Je ne peux pas prouver que c’est Lucas. J’ai signalé une usurpation d’identité. Je ne peux rien faire d’autre. J’ai pas de preuves pour aller le dire aux flics. Je ne sais pas quoi faire. J’ai envie de pleurer. Tellement seule.